NAISSANCE D’UN AUTEUR

By matthieu on November 29, 2011 in Points de vue
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“Les Amours Imaginaires” de Xavier Dolan.

Qui a osé annoncer la fin des auteurs de Cinéma ?
Fini la Nouvelle Vague, le néo-réalisme italien, le Nouvel Hollywood… Les nouveaux réalisateurs, tout comme les anciens au passage, ne semblaient plus créer, inventer, renouveller le langage cinématographique.

Et pourtant, il est arrivé. A 20 ans seulement, Xavier Dolan a foutu une claque à pas mal de monde lors de la sortie de son premier long : “J’ai tué ma mère”. Un pur chef d’oeuvre, une oeuvre entière, à part… C’était tellement beau, qu’à la sortie, j’aurais parié la tête de mon voisin qu’il n’égalerait jamais son premier bijou. Il s’agissait de sa minute de gloire, comme disait Warhol, à la différence près que le film durait 1h40.

Alors bien sur, sa nouvelle création était attendue. “Les Amours Imaginaires”, titre déjà prometteur.

J’aurais aimé évoquer Jim Jarmush, Gus Van Sant ou encore Larry Clark, mais ce serait restreindre son art à une accumulation d’effets de style copiés d’autres artistes. Ça ne l’est en aucune façon.
Il y a une patte, un style chez Dolan.
D’abord la maîtrise totale de la matière cinématograpique. Le montage, de ses mains (difficile de concilier humilité et génie), est une pure merveille rythmique. Il s’amuse avec les ralentis, les accélérés, les champs/contre champs décalés… Montage image qui est d’ailleurs très bien complété par un montage son monstrueux ! Les raccords musicaux sont tellement bien sentis qu’on en oublierait les transitions musicales de FIP.
Enfin, l’image, est tout simplement stupéfiante. Les adjectifs semblent bien limités à son égard: originale, épurée, innovatrice, émouvante… Il est difficile de croire, et pourtant c’est un fait, qu’il ne s’agit pas du même directeur de la photographie que sur “J’ai tué ma mère”. Le style y est, et je pense qu’il est pour une fois justifié de reconnaître la virtuosité de Dolan en matière d’image (découpage, cadres, lumière, costumes, déco…). Les couleurs vives et saturées, l’image brute et contrastée, sont devenus ses ingrédients, sa plume, sa palette.

Toutefois, et par souci d’égocentrisme, je crois ne pas m’être trompé à la sortie de “J’ai tué ma mère”. Son dernier film ne m’a pas autant bouleversé ni même renversé de mon beau fauteuil rouge du Mk2 Beaubourg. Peut-être que ce ‘style’ lui jouera des tours : on retrouve des mécanismes, des rimes, des images (la forêt en automne) qui ont fait la beauté de son premier film. Même si Xavier Dolan continue à “ressortir” ces effets, ces tours de force (qu’il a inventé je le rappelle), nous nous trouvons alors probablement avec un nouveau Woody Allen: le genre d’artiste qui nous présente tous les ans un nouveau film, excellent peut-il être, mais toujours reconnaissable voir inter-changeable.

Au final, il est certain que la directrice de la photographie, Stéphanie Weber-Biron, a du participer, par son talent et son contrôle de la lumière, à la beauté de l’oeuvre. Il est certain que les comédiens, par leur justesse et leur vérité dans le jeu, ont magistralement contribué à faire de ce film une nouvelle pépite. Mais rendons à César ce qui est à César : Xavier Dolan crée, invente, contrôle. Nous sommes face à un nouvel auteur qui fera marque dans l’Histoire du Cinéma.

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